À l’abri d'une ruelle

Ce matin-là était semble-t-il un matin comme les autres. À la boutique les choses étaient plutôt calme, si calme qu'elle piquait du nez sur le comptoir en attendant d'éventuels clients. Son père, posé à l'autre bout de la pièce semblait rire en la voyant ainsi. Quand elle s'éveilla en sursautant quelques minutes après, Boemie grogna contre elle-même. S'étirant elle rangea un peu la boutique pour se dynamiser, mais il n'y avait pas grand-chose à faire et une fois de retour à son comptoir, elle sentait ses yeux se fermer à nouveau et alors qu'elle croyait avoir résisté à l'envie de s'endormir, elle sentit qu'on la poussa gentiment dans le dos. Elle ouvrit alors les yeux et constata qu'elle était devant la porte d'entrée. Interrogeant son père du regard, il lui offrit un très large sourire avant de lui dire :
"Va prendre un peu l'air, ça te fera sans doute du bien pour te réveiller un peu."
Elle voulut protester, mais à peine avait-elle ouvert la bouche qu'il ouvrit la porte pour elle et la fit sortir.
"Il n'y a quasiment personne, ne t'inquiète pas, je m'en sortirai tout seul."
Sur ces derniers mots il ferma la porte, l'empêchant de lui répondre quoi que ce soit. Soupirant, elle ouvrit la porte, traversa la boutique et attrapa sa veste avant de ressortir, sans prononcer un mot. Elle était bien trop fatiguée de toute façon.
Étouffant un bâillement, elle enfonça son visage dans ses épaules et commença à marcher. Elle n'avait aucune idée de ce qu'elle pouvait faire.
Cela faisait sans doute un moment qu'elle errait dans la ville. Elle s'était arrêtée quelques minutes dans une auberge, prenant une simple bière et écoutant discrètement la conversation de deux hommes qui semblaient étrangers à Aratos. Une fois sa bière finie, elle quitta les lieux, les hommes étaient déjà partis de toute façon.
Voilà qu'elle errait de nouveau sans savoir quoi faire. Puis passant devant une ruelle, elle se dit pourquoi pas. Elle regarda à droite, devant et derrière elle et s'engagea à l'intérieur de celle-ci après avoir enfilé son capuchon. Une fois sûr d'être tapis dans l'ombre et bien au fond de la ruelle, Boemie chercha quelques rats mort. Par chance ou malchance, elle en trouva un. Elle allait pouvoir commencer.
S'accroupissant comme elle le pouvait malgré sa jambe boiteuse, elle plaça ses mains au-dessus de l'animal mort et ferma les yeux avant de se concentrer et de faire en sorte de ramener le rongeur à la vie. Après plusieurs tentatives qui furent tout simplement des échecs, elle donna un coup de pied dans le corps inerte, s'énervant contre elle-même. En réalité elle devrait être contente, au moins elle ne risquait pas d'utiliser son pouvoir par inadvertance. Cependant, rejoignant le rat qui avait finis sa course un peu plus loin elle recommença le même scénario dans l'espoir de réussir à faire battre au moins ne serait-ce qu'une seconde le cœur de l'animal.